• Et si on partait au Brésil ?

    Et si on partait au Brésil ?Suite à l'une des promotions réalisées autour de mon livre L'itinéraire sinueux d'une Brésilienne en France, j'ai reçu un message sympathique et amical d'une Alsacienne qui s'était expatriée au Brésil et avait, comme moi, écrit un livre sur son aventure exotique. Nos regards se sont probablement croisés quelque part sur l'Océan Atlantique, le mien étant évidement celui d'une Brésilienne qui vit en Alsace. Sous le pseudonyme de Lili Plume, elle raconte ses découvertes, rencontres et déboires dans le livre Et si on partait vivre au Brésil, ma chérie ? ". 

    C'est un livre plutôt surprenant pour l'anthropologue que je suis, toujours attentive à l'instauration d'une certaine distance vis-à-vis des groupes que j'observe, à l'établissement de ce que Lévi-Strauss appelait le regard éloigné : l'obsession d'une analyse sans jugement me hante et, je l'avoue, peut être parfois écrasante. Par conséquent, le parti pris de Lili Plume qui raconte son aventure sans distance, voire même sans pudeur, m'a paru rafraîchissant. Pour le dire autrement, son observation, son point de vue et ses remarques sont résolument ceux d'une Française confrontée à une culture étrangère qui exprime son étonnement, son épatement et son ahurissement aussi, aisément, sans chichis, rehaussés par une utilisation décomplexée de points d'exclamation, signe de ponctuation proscrit dans un texte académique. 

    Son appréciation de la société brésilienne est bienveillante sans être hypocrite. Lili Plume réussit à bien percevoir l'hédonisme dominant dans cette société spontanée et chaleureuse, plaisant pour les français qui peuvent parfois se sentir à l'étroit sous le poids de règles sociales qui circonscrivent clairement une manière de se comporter en société, mais aussi son débordement vers des attitudes qui révèlent un non-respect des réglés basiques d'un savoir-vivre certain : les énormes retards répétés, le manquement d'un engagement sans un avertissement préalable, les attentes interminables devant un service public défaillant et la banalisation d'une corruption quotidienne qui s'est malheureusement institutionnalisée et personnalisée dans la figure nationalement connue du despachante*.

    Son récit est présenté sous forme de biographie romancée, mais il est également très explicatif, comporte beaucoup d'informations pratiques sur les lieux visités, quelques explications historiques autour de certaines habitudes ainsi que la traduction de quelques mots et expressions en portugais. C'est une lecture qui unit l'utile à l'agréable si vous partez au Brésil sous le statut d'expatrié. Car, même s'il est certain que Lili Plume ne se laisse pas tromper par l'image joyeuse et colorée du pays qui lui est donné à voir, son expérience reflète la société brésilienne vue d'en-haut, celle que connaissent les expatriés occidentaux et que moi, carioca da gema** ayant vécu 30 ans au Brésil, ne connaissais pas. 

    Obs. : Le livre est illustré par Georgia Noël Wolinski.

    * le despachante est un intermédiaire entre un citoyen ordinaire et les organismes publics qui possède des passe-droit lui permettant de ne pas faire la queue moyennant beaucoup de reais

    * carioca da gema = les cariocas sont les natifs de Rio; la gema est littéralement le jaune d’œuf, mais l'expression carioca da gema désigne quelqu'un qui est né et vit ou a vécu à Rio en opposition à ceux qui vivent à Rio mais viennent d'ailleurs. 

     

     

     

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